POLITIQUE

Publié le 07 juin 2024

« La France a été traitée comme un paillasson » : Quand De Gaulle parlait du débarquement en Normandie

Les Racines du Refus de De Gaulle : Un Regard Sur Le Débarquement

Ce jeudi 6 juin, en présence de nombreux dirigeants mondiaux, le président américain Joe Biden et le président français Emmanuel Macron ont présidé la commémoration du débarquement de Normandie. Cette cérémonie offre l'occasion de revenir sur les convictions de Charles de Gaulle qui, historiquement, a refusé de célébrer cet événement.

Les Doutes de De Gaulle Sur Les Motivations Alliées

En se référant à ses déclarations et aux réflexions qu'il partagea à la suite du Conseil du 10 juin 1964, Charles de Gaulle avait une vision très critique de l'opération Overlord, communément appelée le débarquement de Normandie. Il percevait cet acte non pas comme une libération désintéressée de la France par les Alliés, mais plutôt comme une manœuvre stratégique destinée à sécuriser des avantages significatifs pour les forces américaines et britanniques. De Gaulle affirmait que l'objectif principal des Alliés était de progresser rapidement vers le nord pour détruire les bases des V1 et V2 et prendre Anvers, afin de lancer l'assaut sur la Ruhr, le cœur industriel de l'Allemagne.

Un Désaccord Marqué Avec Churchill et Roosevelt

En octobre 1963, Charles de Gaulle refusa de participer aux commémorations du débarquement et critiqua ouvertement le traitement réservé à la France par ses alliés. Il évoqua une altercation avec Churchill qui, selon lui, montrait une préférence prononcée pour Roosevelt, et donc pour les intérêts américains, au détriment de ceux de la France et de l'Europe. De Gaulle était persuadé que les Alliés prévoyaient de traiter la France comme un territoire ennemi, comme ils l'avaient fait en Italie et comme ils se préparaient à le faire en Allemagne.

Selon « C'était De Gaulle » (édition Fallois Fayard, 1997), de Gaulle aurait déclaré : « La France a été traitée comme un paillasson... Il faut commémorer la France, et non les Anglo-Saxons ! » La mise en œuvre envisagée de l'AMGOT, qui aurait placé la France sous administration américaine, et l'impression de monnaie de substitution, étaient perçues par lui comme des tentatives de domination, voire d'occupation.

La fermeté avec laquelle de Gaulle imposa la présence administrative française au fur et à mesure de la libération du territoire met en lumière son engagement pour la souveraineté et l'indépendance nationale. Cela justifie également son choix de ne commémorer que les événements où la France avait eu un rôle prédominant, comme le débarquement en Provence et la libération de Paris et de Strasbourg.

L'Impact Économique et Psychologique de l'Occupation

Les implications de l'intervention alliée ne se limitaient pas aux aspects politiques. L'introduction de la monnaie imprimée par les États-Unis juste après le débarquement, que de Gaulle qualifiait de « fausse monnaie », soulève des questions économiques et symboliques importantes. Ces billets, conçus pour remplacer la monnaie française de l'Occupation, furent mal accueillis par la population et les autorités françaises, qui y virent un symbole de sujétion économique.

La position de Charles de Gaulle vis-à-vis du débarquement de Normandie et des commémorations associées révèle une vision profondément enracinée dans la volonté de préserver l'autonomie et l'intégrité de la France. Cette perspective souligne l'importance de la mémoire nationale et de l'auto-détermination dans le contexte de relations internationales complexes et souvent asymétriques. De Gaulle, en refusant de célébrer avec éclat une libération vue comme incomplète, a voulu rappeler à tous l'importance de ne pas confondre alliance avec dépendance, et libération avec libéralité.



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