ÉCONOMIE

Publié le 08 octobre 2024

La finance de l'ombre : un scandale d’État bien caché qui menace de plonger le monde dans une nouvelle crise économique


EDITO

Tom Benoit sur TV Finance : une analyse éclairante de l'économie parallèle

Tom Benoit, directeur de la rédaction de Géostratégie Magazine, a récemment été invité par TV Finance, une plateforme de médias en ligne spécialisée dans les questions économiques. Reconnu pour son expertise dans ce domaine, il a profité de cette intervention pour aborder un sujet méconnu mais pourtant central dans la finance mondiale : le shadow banking, ou « finance de l’ombre ». Ce phénomène, qui échappe en grande partie à la régulation traditionnelle, a des répercussions majeures sur l’économie mondiale et, par ricochet, sur la vie quotidienne des citoyens.

Lors de son intervention, Tom Benoit a tenu à rappeler qu'au-delà de l'économie courante, celle que nous connaissons tous, il existe une autre forme d'économie, exclusivement réservée au monde de la finance : le shadow banking. Bien que largement ignorée du grand public, cette « économie parallèle » a des impacts directs sur les marchés et constitue une menace grandissante pour l'économie réelle.

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Le Shadow Banking : une économie de l'ombre en expansion

Le shadow banking, ou finance de l’ombre, désigne l’ensemble des activités financières effectuées en dehors du système bancaire classique. Ces transactions, bien qu’ayant les mêmes objectifs que ceux des banques traditionnelles (prêts, financement, gestion de liquidités), échappent aux réglementations et à la supervision des autorités compétentes. Ainsi, les entités telles que les fonds spéculatifs (hedge funds), les fonds de pension, les fonds d’investissement privés, ainsi que certains instruments financiers dérivés, opèrent en toute indépendance et souvent dans l'opacité.

Ces institutions ressemblent à des banques dans leur fonctionnement, mais n'en portent pas le statut légal, ce qui leur permet d'éviter les contraintes strictes imposées aux banques traditionnelles, telles que les exigences de liquidité et de capital. Ce manque de transparence et de régulation rend le shadow banking particulièrement risqué pour l’économie mondiale, car il favorise la prise de risques démesurée, avec des conséquences potentiellement dévastatrices pour l’économie réelle.

Les dangers du Shadow Banking pour l'économie mondiale

L’un des principaux dangers liés au shadow banking réside dans son manque de régulation. Les institutions de cette économie parallèle peuvent prendre des risques excessifs sans être soumises aux mêmes exigences que les banques traditionnelles, en termes de réserves de capital ou de gestion des risques. Par exemple, elles peuvent prêter ou emprunter des sommes d'argent bien supérieures à ce qui serait autorisé pour des institutions bancaires classiques.

En cas de crise financière, comme celle de 2008, ces acteurs échappent souvent à toute forme de responsabilité. Ce sont les banques traditionnelles, et in fine les États, qui doivent intervenir pour stabiliser les marchés. Les sauvetages financiers effectués par les gouvernements, à coup de fonds publics, aggravent souvent les déficits et augmentent la dette publique. Les conséquences pour les citoyens sont directes : austérité, coupes dans les services publics et augmentation des inégalités.

Une économie au service des élites financières

Le shadow banking, de par sa nature et son mode de fonctionnement, sert essentiellement les intérêts des grandes entreprises et des investisseurs fortunés. Contrairement aux banques traditionnelles, dont l’une des missions est de financer l’économie réelle (notamment en accordant des prêts aux particuliers ou aux entreprises), les institutions de la finance de l'ombre cherchent avant tout à maximiser les profits de leurs clients fortunés.

Dans ce cadre, les préoccupations des citoyens ordinaires, telles que la création d’emplois, le financement des infrastructures ou encore la protection des services publics, passent au second plan. Pire encore, les transactions réalisées dans le cadre du shadow banking échappent souvent à toute forme de régulation ou de taxation, grâce à des structures complexes et le recours aux paradis fiscaux. Ce système contribue donc à creuser les inégalités sociales et à priver les États de ressources financières qui pourraient être réinvesties dans le bien commun.

Une menace croissante pour la stabilité financière mondiale

La fragilité systémique induite par le shadow banking est un autre facteur de risque majeur. Étant donné le manque de transparence dans les opérations effectuées par ces institutions, il est difficile pour les régulateurs de mesurer les risques et d'anticiper les crises. L'opacité des transactions, combinée à la prise de risques spéculatifs, favorise la création de bulles financières qui, lorsqu'elles éclatent, peuvent entraîner des crises économiques de grande ampleur.

Ces bulles financières sont d’autant plus dangereuses qu’elles affectent des secteurs entiers de l'économie réelle, plongeant des millions de personnes dans des situations précaires. Ainsi, les entreprises et les banques traditionnelles, souvent exposées au shadow banking par le biais de prêts ou d'investissements, peuvent rapidement être entraînées dans des crises financières qu'elles ne peuvent pas maîtriser. Cela accroît l'instabilité économique mondiale et augmente les risques de récession.

Les conséquences sociales des crises financières liées au Shadow Banking

Les crises financières provoquées par le shadow banking ont des conséquences dramatiques pour les populations. L’exemple de la crise de 2008 reste gravé dans les mémoires. Des millions de personnes ont perdu leurs emplois et leurs logements, tandis que les responsables de ces pratiques financières dangereuses ont échappé à toute forme de sanction.

De plus, pour stabiliser les économies après de telles crises, les gouvernements sont souvent contraints de réduire leurs dépenses publiques. Les services sociaux, tels que la santé, l'éducation ou les infrastructures, sont souvent les premiers à en pâtir. Ce sont donc les populations les plus vulnérables qui subissent de plein fouet les conséquences des pratiques du shadow banking, avec une augmentation des inégalités et une dégradation de leur qualité de vie.

Vers une régulation nécessaire et urgente du Shadow Banking

Face à ces dangers, la question d’une régulation plus stricte du shadow banking devient urgente. Il est nécessaire d’intégrer ces activités financières dans un cadre législatif qui protège l’économie réelle et les citoyens. Plusieurs institutions internationales, telles que le Fonds monétaire international (FMI) et le Conseil de stabilité financière (CSF), ont déjà émis des recommandations en ce sens.

Cependant, la mise en œuvre de ces régulations se heurte à de nombreux obstacles, notamment la résistance des acteurs de la finance de l'ombre et la complexité des systèmes financiers mondiaux. Une coopération internationale sera essentielle pour créer un cadre réglementaire efficace et protéger l'économie mondiale des dérives de la finance de l'ombre.

La nécessité d’une réforme pour une économie plus juste

Le shadow banking représente une menace sérieuse pour l'économie réelle, en exacerbant les risques financiers et en creusant les inégalités. La régulation de ce système est donc une question cruciale de justice économique. Pour protéger les populations des effets dévastateurs des crises financières, il est urgent de réformer la finance mondiale en introduisant des mécanismes de transparence, de responsabilité et de régulation. Seule une action collective et internationale permettra de rééquilibrer les rapports de force entre l’économie réelle et l’économie parallèle du shadow banking.

Par Tony Houdeville


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