L'Actu Citoyenne

Une austérité injuste qui pénalisera les plus fragiles : ce qu'il faut savoir sur les mesures du gouvernement


POLITIQUE | Publié le 10 octobre 2024


OPINION

Projet de Loi de Finances 2025 : Une Austérité Injuste qui Pénalise les Plus Fragiles

Le jeudi 10 octobre, le gouvernement de Michel Barnier a dévoilé son projet de loi de finances pour 2025. Derrière le discours de responsabilité budgétaire, c’est une véritable politique d’austérité qui se dessine. Avec une réduction de 60 milliards d’euros, principalement orientée vers les dépenses publiques, le gouvernement prétend vouloir redresser les finances de l'État. Pourtant, cette approche manque cruellement de justice sociale et s’attaque à ceux qui subissent déjà de plein fouet les effets de la crise.

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Un Fardeau Injustement Réparti

Le gouvernement présente ce plan comme une « nécessité urgente » pour maîtriser la dette publique et prévenir un déficit qui pourrait atteindre 7% du PIB. Selon Antoine Armand, ministre de l'Économie, et Laurent Saint-Martin, ministre délégué au Budget, il s’agit de retrouver une trajectoire soutenable. Mais à quel prix ? Ce programme fait peser les deux tiers des économies sur la réduction des dépenses publiques, un fardeau qui touchera directement les services essentiels dont dépendent les plus modestes.

Alors que le pays souffre d’inégalités croissantes, ce choix est non seulement dangereux, mais profondément injuste. Plutôt que d’imposer des réformes structurelles aux grandes fortunes, les mesures annoncées continueront à fragiliser les classes populaires et moyennes. Les coupes budgétaires dans les services publics ne feront qu’accentuer les difficultés d’accès aux soins, à l’éducation et aux retraites, alors même que ces secteurs sont déjà sous pression.

Une Réforme des Retraites au Goût Amer

Parmi les mesures les plus contestables de ce projet figure la réforme des retraites. Le gouvernement prévoit d’indexer les pensions sur l’inflation, mais avec un décalage de six mois. En pratique, cela signifie que les retraités devront attendre plus longtemps pour voir leurs pensions ajustées au coût de la vie, et donc, pour nombre d’entre eux, subir une érosion de leur pouvoir d’achat.

Le discours officiel tente de justifier cette mesure en la qualifiant de « nécessaire » après les revalorisations exceptionnelles des dernières années. Mais cela n’efface pas le fait que les retraités, qui comptent souvent parmi les plus vulnérables, seront directement touchés par ce report. Pendant ce temps, les hauts revenus ne subiront qu'une contribution symbolique, alors que des mesures beaucoup plus drastiques auraient pu être envisagées.

La Taxation des Plus Riches : Un Effet d'Annonce?

Le gouvernement a tout de même annoncé une nouvelle contribution pour les 65 000 foyers les plus aisés, soit 0,3% des contribuables. Ces derniers devront s’acquitter d’un taux minimal d’imposition de 20% sur leurs revenus. Si cette mesure peut sembler aller dans la bonne direction, elle reste largement insuffisante.

En réalité, cette contribution exceptionnelle n’est que temporaire, prévue pour trois ans. De plus, en se limitant aux contribuables déjà assujettis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), le gouvernement ne remet pas en question l’ensemble des avantages fiscaux dont bénéficient les ultra-riches. Au lieu d’instaurer une réforme fiscale de grande ampleur, on se contente ici de quelques ajustements qui ne touchent que la surface du problème.

Les Grandes Entreprises Peuvent Dormir Tranquilles

Du côté des entreprises, l’austérité frappe également, mais de manière très mesurée. Les grandes entreprises, celles dont le chiffre d’affaires dépasse le milliard d’euros, seront soumises à une nouvelle taxe sur leurs profits. Cette mesure devrait rapporter 12 milliards d’euros sur deux ans, ce qui, en apparence, semble significatif. Mais dans un contexte où les multinationales continuent d’engranger des bénéfices records, cela reste une goutte d’eau.

De plus, cette contribution sera dégressive en fonction du chiffre d’affaires, permettant ainsi aux entreprises de contourner les paliers d’imposition les plus élevés. Une véritable taxation sur les superprofits, qui aurait pu générer des recettes bien plus substantielles, est tout simplement évitée. Encore une fois, ce sont les grandes entreprises qui sont protégées au détriment des citoyens les plus modestes.

Des Mesures Cosmétiques sur l'Impôt sur le Revenu

Le gouvernement a également annoncé une révision du barème de l'impôt sur le revenu pour 2025. Cela devrait permettre à environ 530 000 foyers d'échapper à l'imposition, une mesure que l'on pourrait considérer comme positive. Mais, dans le même temps, aucune véritable réforme progressive de l'impôt n'est proposée pour rééquilibrer le poids fiscal entre les différentes classes sociales.

En l'absence d'une taxation accrue des plus fortunés, cette révision ne résout en rien les profondes inégalités fiscales qui perdurent dans le pays. Le gel du barème de l'impôt, brièvement évoqué, a été écarté sans discussion sérieuse, laissant encore une fois passer l'opportunité de réformer en profondeur notre système fiscal.

Les Services Publics, Grands Perdants du PLF

Le plus inquiétant dans ce projet de loi de finances reste la volonté de continuer à rogner sur les services publics. Si le gouvernement assure que les budgets de l’armée et de la santé ne seront pas affectés, il est clair que d'autres secteurs essentiels verront leurs ressources réduites. Les services à la personne, l’éducation et les prestations sociales, déjà fragilisés, risquent d’être encore plus durement touchés.

Alors que les plus vulnérables dépendent de ces services pour maintenir un niveau de vie décent, cette réduction des dépenses publiques est tout simplement irresponsable. Il est inacceptable de faire payer aux citoyens les plus fragiles les erreurs de gestion et les priorités mal placées du gouvernement.

Une Austérité qui Profite aux Plus Puissants

Le projet de loi de finances 2025 est un exemple flagrant d’une politique d’austérité qui protège les intérêts des plus riches tout en faisant peser le poids de la crise sur les classes populaires. Plutôt que de mettre en place des réformes fiscales ambitieuses pour taxer les grandes fortunes et les entreprises qui engrangent des profits faramineux, le gouvernement continue de s’attaquer aux dépenses publiques, au détriment des plus vulnérables.

Ces propositions seront débattues dans les prochaines semaines, mais elles illustrent déjà un choix politique clair : celui de maintenir un système inégalitaire au bénéfice des plus puissants. Pour redresser véritablement les finances de l’État et construire une société plus juste, c’est une réforme fiscale en profondeur qui est nécessaire, une réforme qui taxe enfin les plus riches à la hauteur de leur richesse.

Par Tony Houdeville