L'Actu Citoyenne

Israël : Une question sensible d'une journaliste met le ministre des Affaires étrangères dans l'embarras


POLITIQUE | Publié le 07 octobre 2024


INFORMATION

Le silence embarrassé de la France face aux bombardements israéliens : une prudence exagérée ?

La prudence du gouvernement français quant à la question des frappes israéliennes contre Gaza et le Liban devient de plus en plus visible, provoquant des interrogations et des critiques. En particulier, l'attitude du ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, lors de son premier voyage officiel au Liban, le 30 septembre, a mis en lumière cette gêne palpable lorsqu'il s'agit d'évoquer les actions militaires israéliennes. Ce déplacement, marqué par un échange tendu avec des journalistes, a illustré la difficulté de la France à nommer clairement les bombardements israéliens, une réticence qui en dit long sur les rapports complexes entre Paris et Tel-Aviv.

Jean-Noël Barrot, encore novice dans ses fonctions de ministre des Affaires étrangères, a été confronté à une question directe d’une journaliste, pointant du doigt le langage prudent utilisé par la France. Pourquoi, interroge-t-elle, parler de « ressortissants français morts dans des explosions » plutôt que de « bombardements » ? Une question légitime qui touche au cœur de la perception et de la communication autour des actions militaires d'Israël dans la région. La réponse maladroite du ministre ne fait qu'accentuer la gêne : « La première question, c'était ? Pardon. » s'excuse-t-il, manifestement pris de court. Lorsque la journaliste insiste, Jean-Noël Barrot, visiblement embarrassé, se contente d'une réponse évasive, admettant finalement avoir parlé de « frappes » mais sans aller jusqu’à utiliser le terme « bombardements » israéliens.

►Suivez-nous sur Google News

Une prudence dénoncée par les journalistes sur place

Cet échange a rapidement pris une tournure encore plus tendue lorsqu'un autre journaliste dans la salle a interpellé le ministre avec une question qui a révélé l'ampleur de l'embarras français : « Vous ne les avez pas qualifiées d'israéliennes. On ne peut pas imaginer qu'elles viennent de Mars ! » Cette remarque cinglante met en lumière une réalité souvent critiquée : la France semble éviter de désigner clairement Israël comme responsable des bombardements, préférant utiliser des termes plus neutres comme « frappes » ou « explosions ». Un choix de vocabulaire qui ne passe pas inaperçu, surtout dans un contexte où la précision des mots est primordiale pour qualifier la gravité des événements et le rôle des acteurs impliqués.

Cette prudence exacerbée du gouvernement français sur la question israélienne est perçue par certains comme une forme de complaisance vis-à-vis d'Israël. En effet, depuis plusieurs années, la France adopte une attitude mesurée lorsqu'il s'agit de critiquer ouvertement les actions militaires israéliennes, en particulier dans les territoires palestiniens occupés. Cette attitude soulève des interrogations, notamment sur la capacité de la France à jouer un rôle de médiateur neutre et impartial dans le conflit israélo-palestinien.

Un silence qui questionne l'engagement français au Proche-Orient

L’attitude de Jean-Noël Barrot au Liban s’inscrit dans une tradition diplomatique française marquée par une certaine retenue lorsqu’il s’agit de condamner directement les actions militaires d’Israël. Alors que les frappes israéliennes sur Gaza et au Liban continuent de provoquer la mort de nombreux civils, la France semble privilégier une approche prudente, évitant de s'attirer les foudres de Tel-Aviv. Pourtant, cette position pose question, notamment en ce qui concerne l'engagement humanitaire et éthique de la France dans la région.

Les frappes israéliennes, souvent perçues comme disproportionnées, ont fait l'objet de nombreuses critiques au sein de la communauté internationale. La mort de civils, parmi lesquels des ressortissants français, soulève légitimement la question de la réponse de la France face à ces événements tragiques. Pourquoi ce silence relatif ? Pourquoi cette prudence dans le choix des mots ? Pour certains observateurs, cette retenue traduit une volonté de maintenir des relations diplomatiques cordiales avec Israël, un partenaire stratégique pour la France au Proche-Orient. Mais à quel prix ?

Une diplomatie à géométrie variable

Le choix des mots dans la diplomatie n'est jamais anodin. Parler d'« explosions » plutôt que de « bombardements » permet de diluer les responsabilités, de rendre floues les implications politiques et militaires d'un acteur comme Israël dans les conflits régionaux. Cependant, cette stratégie de communication, loin d’apaiser les tensions, semble exacerber les critiques à l’égard de la France, notamment de la part des ONG humanitaires et des défenseurs des droits de l’Homme. Ces derniers estiment que l’utilisation de termes ambigus affaiblit la portée des condamnations internationales et laisse entendre une forme de complaisance vis-à-vis des actions militaires israéliennes.

Ce silence embarrassé de la France, que l'on a pu constater lors de la visite de Jean-Noël Barrot au Liban, reflète une diplomatie à géométrie variable. Alors que la France se montre souvent très ferme lorsqu'il s'agit de condamner des actions militaires en provenance d'autres États, elle semble faire preuve de beaucoup plus de retenue dès qu'il s'agit d'Israël. Cette attitude risque de nuire à la crédibilité de la France sur la scène internationale, notamment dans son rôle de médiateur dans le conflit israélo-palestinien.

La nécessité d'une prise de position claire

Pour regagner en crédibilité et en cohérence, la France doit adopter une position plus ferme et plus transparente quant à son discours sur les frappes israéliennes. Les mots comptent, et dans ce contexte, parler de « bombardements » plutôt que d'« explosions » n'est pas seulement une question de rhétorique, c'est une manière de reconnaître la gravité des faits et d'affirmer une position éthique claire.

Le Proche-Orient est une région complexe, où chaque geste diplomatique est scruté et analysé. Dans ce contexte, la prudence excessive de la France pourrait être perçue comme un signe de faiblesse ou, pire encore, comme une forme de complicité tacite avec des actions militaires jugées disproportionnées. Une clarification du discours français sur ces questions s'avère nécessaire pour restaurer la confiance dans la parole de la France et pour démontrer un véritable engagement en faveur de la paix et de la justice au Proche-Orient.

Par Tony Houdeville