« Merci pour ce dégradé de 49-3 » Gabriel Attal embarrassé par le discours ironique de ce député
POLITIQUE | Publié le 03 décembre 2022
Pierre Dharréville, député, intervenait lors de la séance à l'Assemblée nationale ce mercredi 30 novembre 2022.
“ J'ai senti qu'il y avait une sorte d'embarras. ”
Pierre Dharréville : « Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Ministres, chères et chers collègues. Je ne voudrais pas déranger en fait, je ne voudrais pas déranger. Et au stade où nous en sommes, je vous ai déjà parlé à au moins deux reprises ici, à cette tribune, de ce que nous pensions du budget de la Sécurité sociale. J'ai essayé de formuler un certain nombre de propositions. Bon, j'ai senti qu'il y avait une sorte d'embarras. Et voilà, je ne veux pas gêner en montant ici à cette tribune aujourd'hui, vraiment. Moi je croyais, en arrivant ici, devoir discuter le budget, devoir discuter les recettes, les dépenses, les perspectives. Et j'ai compris en fait que ce n'était pas tout à fait le cas et que je suis ici pour dire : " Oui, Monsieur le ministre " , " Vous avez raison madame la ministre " , " Bravo, monsieur le ministre " , " Pardon madame la ministre " ou " Merci, monsieur le ministre ". Alors du coup, je me suis livré à un petit recensement, et je voudrais d'abord effectivement dire pardon pour avoir osé déposer des amendements, pour essayer de défendre des idées, porter des propositions, porter aussi la colère des personnels soignants que je rencontre dans mon territoire et ailleurs. Et je sais que ça a beaucoup contrarié Madame la Première Ministre. Je voudrais également dire pardon pour avoir voté et fait voter des amendements, et c'est vrai que j'ai largement outrepassé mon mandat de député en agissant de la sorte. Pardon également pour avoir mis en danger la subtile cohérence de votre proposition, alors qu'en commission, vous nous aviez quand même fait entendre raison et j'avais mal révisé pour la séance. Pardon pour avoir voulu peut-être vous voler un temps précieux à vous parler d'hôpital, de pédiatrie, de psychiatrie, de maladie professionnelle, que sais-je encore ? »
“ Merci pour ce dégradé de 49-3 qui donne tant de saveur à nos débats. ”
Pierre Dharréville : « Alors que derrière, ça nous a été dit par la Première Ministre, il y avait l'examen du budget de l'État qui lui quand même devait prendre du temps. Alors quand même, voilà. Alors je voudrais également, parce que Madame la Première Ministre a dit : " Je crois au débat quand il est mené de bonne foi ; " Alors merci de tout cœur pour votre bonne foi. À la bonne foi, je réponds toujours par de la bonne foi, à la désinvolture, pas toujours par de la désinvolture en l'occurrence, plutôt par un peu d'ironie amère et féroce. Mais là, ce n'est pas le cas, je vous rassure tout de suite. Merci pour la qualité de votre écoute et la qualité de nos échanges. Et au moment où s'achève cette discussion, on a le sentiment, en effet, qu'elle n'a jamais véritablement commencé, ou alors que c'était hier. C'est dire l'intensité de nos discussions. C'est fou comme le temps passe vite. Lorsqu'elle est venue les interrompre avec regret. Quoi que j'ai eu le sentiment que... C'est vrai ça, j'ai eu un peu le sentiment qu'au fur et à mesure, Madame la Première Ministre prenait un peu goût à cet exercice du 49-3. Bon, une appréciation tout à fait personnelle mais elle a dit : " Des débats ont eu lieu en séance à l'Assemblée nationale et au Sénat. À chaque fois les débats ont été constructifs. " Alors merci pour ces débats si constructifs. Merci pour ce foisonnement, cette pluie, ce camaïeu, peut-être ce dégradé, plus exactement, ce dégradé de 49-3 qui donne tant de saveur à nos débats. Je ne sais pas si vous connaissez l'histoire du valeureux petit tailleur qui disait : " J'en abats sept d'un coup. " Vous en avez abattus pour votre part cinq d'un coup. C'est déjà une belle performance que je voudrais évidemment saluer ici devant vous. »
“ De toute façon, s'il y a un problème, vous sortez un 49-3. ”
Pierre Dharréville : « Et je crois qu'on aura finalement rarement aussi peu débattu de santé, de protection sociale depuis l'existence des lois de financement de la sécurité sociale. Donc merci pour cette performance également. Merci pour ce moment rare, ce moment de magie, ce moment de grâce, ce moment où, juste après l'examen de la motion de censure, vous vous rappelez, Madame la Première Ministre est arrivée direct, claque, un deuxième 49-3 derrière. C'était vraiment aussi un grand moment. Merci enfin pour ce budget dont la beauté, la pertinence résident sans doute dans l'indigence, les manques, les défauts, les insuffisances, les fausses bonnes idées. C'est vrai qu'il est inférieur en valeur absolue au budget de l'année dernière et je n'avais pas su apprécier tout cela à sa juste valeur. Alors je voudrais faire peut-être une petite citation pour agrémenter ce propos d'une chanson que vous connaissez sans doute. " Voilà, c'est fini " chante Jean-Louis Aubert. " On a tant ressassé les mêmes théories, on en a tellement tiré chacun de notre côté, que voilà c'est fini. " Nous arrivons effectivement au bout de cette belle discussion. C'est quand même beau une démocratie dans laquelle le Parlement joue son rôle, dans laquelle il est vraiment respecté. Voilà, bon, je ne voudrais encore une fois vraiment pas trop abuser. Alors je vous ai préparé ici un petit dossier. Je me suis permis, comme on a dit, que vous prévoyez des modifications dans le mois de janvier. J'ai apporté quelques suggestions de modifications que vous n'avez, sans doute, pas eu le temps d'examiner vraiment. Alors moi, je me tiens à votre disposition ici. Si vous avez eu le temps, vous le compulsez un peu, vous regardez vaguement comme ça. Vous n'êtes pas obligée d'en tenir compte. De toute façon, s'il y a un problème, vous sortez un 49-3. Pas de chichis entre nous, comme ça ce sera réglé. Voilà, je vous laisse. Je ne veux pas déranger. »